ÉCRITURE

LE BLUES DU PREMIER AVRIL

Mélancolie d’un vieux dopé

Au lendemain des élections
Comme à la suite d’une brosse ratée
La tête encore sous les émanations
Je me demande ce qui s’est réellement passé
C’est le premier avril, Et je n’ose regarder, Dans mon dos fragile, Le poisson qui y est accroché

J’erre dans les rues de Montréal
Ne tiennent plus que par un coin, les affiches oubliées
Vestiges de la veille, seules preuves d’un bal
Comme des cadavres de bouteilles cassées
C’est le premier avril, Et je n’ose regarder, Dans mon dos fragile, Le poisson qui y est accroché

Je garde en mémoire le souvenir
De quand la dope faisait encore tripper
Du temps aussi où c’était avec plaisir
Que nous nous rendions confiants pour aller voter
C’est le premier avril, Et je n’ose regarder, Dans mon dos fragile, Le poisson qui y est accroché


Mesures sociales oubliées, monde à l’envers
Mercantilisme et appât du gain
La « une » ne traîte plus que de faits divers
La politique ne sert que les politiciens
C’est le premier avril, Et je n’ose regarder, Dans mon dos fragile, Le poisson qui y est accroché

Le bulletin de vote, feuille de prescription
Je coche moi-même le médicament
À mes petits problèmes, la solution
De choisir entre une valium ou une ativan
C’est le premier avril, Et je n’ose regarder, Dans mon dos fragile, Le poisson qui y est accroché

Locataire gêné de faire ce que je veux
Je m’imaginais louer avec option d’achat
J’invite les autres à se sentir chez eux
Alors que moi-même je ne le suis pas
C’est le premier avril, Et je n’ose regarder, Dans mon dos fragile, Le poisson qui y est accroché

Devant la pâleur de nos élus
Qui noirciront les pages du livre à peine commencé
J’essaie désespérément de me saouler, cherchant l’abus
Et ne trouvant que de la .5 pour y arriver
C’est le premier avril, Et je n’ose regarder, Dans mon dos fragile, Le poisson qui y est accroché

Paul Grégoire 2007